Nous avons choisi de développer ce projet consacré au maintien des droits humains pour les femmes et les enfants car nombre d’entre eux souffrent au quotidien de violences et autres sévices sans pouvoir se plaindre ni recevoir d’aide de quiconque. En effet, ils craignent leur bourreau et vivent dans la terreur. De plus, la majorité d’entre eux maîtrise peu le français, ce qui fait qu’ils manquent vraiment d’informations pour savoir comment se plaindre et oser entamer une procédure. Il leur est donc très difficile de se faire comprendre des Services de police et autres Services sociaux. Au final, ils se retrouvent seuls face à leur destin sans aucun espoir d’amélioration et subissent donc inlassablement menaces et coups.
Le but de nos rencontres était d’informer de manière simple et concrète ce public féminin des moyens existants pour sortir enfin de la spirale de la violence. Nous leur avons expliqué et transmis les numéros d’urgence à former pour obtenir de l’aide et les adresses où se rendre en cas d’urgence, comme l’association « L’ACCUEIL » qui se trouve en plein cœur du quartier de Hodimont. Des lieux de rencontres et d’échanges, comme « VIE FEMININE » leur ont été présentés. Il était également important pour elles d’exprimer leur vécu et celui de leurs enfants. En discuter avec d’autres femmes dans la même situation dramatique permet de se sentir moins seules. L’aide des personnes-ressources spécialistes du sujet s’est faite dans une ambiance sereine et conviviale mettant chaque participante en confiance.
Pour atteindre ces objectifs, nous avions sélectionné 6 à 8 participantes motivées par la thématique et intéressées par les débats d’idées avec la volonté de débattre et de partager leur vécu. Ces participantes proviennent principalement de nos cours de français mais également de nos permanences sociales où elles ont parfois expliqué leur parcours de vie difficile.
Ensuite, nous avons pris contact avec certains intervenant(e)s / personnes-ressources pour l’animation de nos rencontres.
Calendrier du projet :
Fin mai 2023 : Première rencontre avec l’équipe pour présenter le projet aux assistantes sociales afin de sélectionner ensemble les femmes susceptibles d’y participer. Dans la foulée, nos assistantes sociales ont présenté le programme à leurs bénéficiaires tandis que notre coordinateur a abordé la thématique des droits humains en classe avec deux groupes d’apprenants FLE et a ainsi proposé à plusieurs femmes du groupe d’intégrer le projet.
A la mi-juin 2023, Introduction des demandes de projection auprès de Libération Films et Unisono pour les trois films repris ci-dessous.
La secrétaire de direction, une de nos assistantes sociales et le coordinateur du Centre ont pris part aux trois rencontres.
Le mardi 11 juillet 2023 : nous avons projeté le film « DIFRET » de Zeresenay Mehari sur le thème des droits des enfants. L’après-midi complète a été consacrée à la projection du film et aux échanges, soit de 13 heures 30 à 16 heures 30 (durée : 3 heures).
Synopsis : « A trois heures de route d’Addis Abeba, Hirut, 14 ans, est kidnappée sur le chemin de l’école : une tradition ancestrale veut que les hommes enlèvent celles qu’ils veulent épouser. Mais Hirut réussit à s’échapper en tuant son agresseur.
Accusée de meurtre, elle est défendue par une jeune avocate pionnière du droit des femmes en Ethiopie. Leur combat pour la justice commence, mais peut-on défier une des plus anciennes traditions ? »
Pour gérer l’animation du débat, nous avons fait appel à Monsieur Alain HOUART, Juriste spécialiste du Droit des Etrangers et bénévole dans les Centres fermés pour réfugiés de la région germanophone. Cette personne-ressource travaille quotidiennement avec le public immigré et gère deux permanences juridiques bi-hebdomadaires dans notre association.
Nous avons distribué des brochures éditées par GAMS Belgique au sujet du mariage forcé « Le mariage forcé … et ma dignité dans tout ça ? » et en avons discuté après la projection du film. Ce petit prospectus est le résultat d’1 an ½ de réflexions et échanges entre femmes concernées par le mariage forcé (voir brochure en annexe).
Cette brochure déconstruit et visibilise les représentations de cette pratique touchant 88 % des filles et femmes à travers le monde. Elle comporte 10 idées reçues qui ont été déconstruites par le juriste mais également par une de nos assistantes sociales 10 idées reçues ont été déconstruites et argumentées : parmi celles-ci, on retrouve : « Le mariage forcé, c’est culturel, cela fait partie de la tradition », « C’est la religion qui l’impose », « Un bon mariage fait l’honneur de la famille », ou encore « On doit se marier pour avoir des enfants », … Parmi les participantes, certaines ne comprenaient pas pourquoi ces idées étaient fausses car elles y adhéraient personnellement. Ce fut difficile de leur faire comprendre qu’il s’agissait bien d’idées fausses ancrées depuis des siècles et qu’il fallait s’y opposer afin d’éviter des souffrances inutiles aux filles et jeunes filles de leur famille.
Avis des participantes :
Cette première rencontre rassembla des participantes motivées qui ont beaucoup apprécié le film même s’il réveillait des souvenirs difficiles dans leur mémoire. En effet, certaines d’entre elles ont vécu ce qui est arrivé à Hirut, l’héroïne du film. L’une d’entre elle a expliqué qu’elle a été mariée de force dans son pays d’origine mais il était douloureux pour elle de revenir sur ce passé qu’elle tente à tout prix d’oublier en Belgique mais ce n’est pas facile car les souvenirs des violences subies ressurgissent régulièrement.
Nous avons aussi parlé des traditions dans les pays de chacune et elles nous ont expliqué qu’il était impossible d’y échapper tant elles sont ancrées dans leur culture depuis toujours. Même si elles comprenaient bien que ces traditions n’étaient pas autorisées en Europe, les mariages se font une fois de retour dans le pays de naissance de la jeune fille, que ce soit à l’occasion de vacances ou d’une visite à la famille. Le risque de poursuites judiciaires ne fait pas peur aux familles qui vivent à l’étranger.
A la fin de chaque rencontre, nous avons distribué des formulaires d’évaluation aux participantes. La réponse y est facultative et permet de connaître leur ressenti sur l’ensemble de l’activité (voir les grilles des trois rencontres en annexe).
Les femmes ont expliqué en quoi consistent les traditions dans leur pays d’origine. La jeune fille n’a aucun droit. Elle est considérée comme une marchandise et subit du harcèlement, des menaces et de la violences avant d’être mariée de force. Le film a été jugé révoltant. Il est incroyable de constater que sous couvert de traditions, le libre arbitre n’a pas sa place. Le film a permis au public de prendre conscience de la problématique et de développer des pistes de réflexion ensemble.
Le mercredi 12 juillet 2023 : nous avons projeté le film « SCANDALE » de Jay Roach sur le thème du machisme et du sexisme envers les femmes. La matinée complète a été consacrée à la projection du film et aux échanges, soit de 13 heures 30 à 16 heures 30 (durée : 3 heures).
Synopsis : « Inspiré de faits réels, ce film nous plonge dans les coulisses d’une chaine de télévision aussi puissante que controversée. Des premières étincelles à l’explosion médiatique, découvrez comment des femmes journalistes ont réussi à briser la loi du silence pour dénoncer l’inacceptable ».
Pour gérer l’animation du débat, suite au désistement d’une des intervenantes pressenties, nous avons de nouveau fait appel à Alain HOUART qui était partant pour présenter et débattre de la thématique concernant le sexisme et le machisme envers les femmes. En sa qualité de juriste, il a apporté un éclairage nouveau sur ces fléaux qui frappent toujours fortement les femmes à l’heure actuelle et dans toutes les tranches de la société. De plus, Elisa PONS, l’une de nos assistantes sociales, était également présente afin d’inciter certaines femmes à oser parler de leur vécu et de se libérer ainsi d’un poids.
Avis des participantes :
Mises en confiance par l’animateur qu’elles avaient déjà rencontré la veille, elles furent plus enclines à parler de leur vécu. Le film « SCANDALE » fut pour elles révoltant car il montrait que le sexisme est omniprésent dans les hautes sphères de la société, ce qu’elles ignoraient. Pour elles, télévision rimait avec réussite et glamour mais ce n’est malheureusement pas la vérité.
Le juriste leur a fait comprendre que dans ce milieu, c’était un peu le principe du « donnant – donnant ». Effectivement, pour faire une belle carrière de présentatrice vedette à la télévision sur une grande chaine comme la FOX, ces journalistes – généralement des femmes séduisantes – doivent accepter les avances sexuelles pressantes des producteurs et patrons de chaine. Autrement, elles risquent de tout perdre, leur statut et leur salaire élevé.
Chaque participante a donné son point de vue. Dans le groupe, une des femmes avait malheureusement eu à subir du sexisme et du machisme de la part de son entourage et l’a expliqué aux autres. Toutes connaissaient l’une ou l’autre victime dans l’environnement proche ou la famille.
Le jeudi 13 juillet 2023 : nous avons projeté le film « DIRTY GOD » de Sacha Polak sur le thème des violences familiales et intra-familiales. La matinée complète a été consacrée à la projection du film et aux échanges, soit de 13 heures 30 à 16 heures 45 (durée : 3 heures 15)
Synopsis : « Le visage à moitié brûlé et une petite fille de deux ans. C’est tout ce qu’il reste de la relation de Jade à son ex qui l’a défigurée à l’acide. A la violence de cette histoire succède désormais celle du regard des autres. Pour ne pas couler, Jade n’a d’autre choix que de s’accepter, réapprendre à sourire et à aimer ».
Pour gérer l’animation du débat, nous avons cette fois reçu Madame Judith PONCELET, animatrice en éducation permanente féministe – Antenne de Verviers et Fléron de « VIE FEMININE ». Cette personne-ressource a suivi bon nombre de formations sur la thématique et était donc fort à l’aise pour animer les échanges.
Avis des participantes :
Ce film a servi de support aux échanges qui ont été difficiles car l’histoire résonnait dramatiquement dans la tête des participantes qui, pour la plupart, revivaient un pan de leur passé douloureux. Le film les a bouleversées et certaines ont eu du mal à retenir leurs larmes. Le film a montré qu’on pouvait toujours s’en sortir avec beaucoup de volonté et réapprendre à vivre et à oublier un triste parcours de vie pour en créer un nouveau bien meilleur. La violence reste ancrée en la victime même après l’éloignement de l’auteur des faits. Le débat a un peu dérivé sur les violences conjugales et sur l’importance d’être informée sur ses droits et sur la manière de dénoncer ces faits graves souvent dramatiques. La rencontre a permis de montrer le lien entre les violences et discriminations sexistes dans la société et les violences qui se passent au sein du couple. Toutes pensent que ce film devrait être présenté aux hommes afin de leur faire prendre conscience de leur violence et de pouvoir se remettre en question avec l’aide d’une psychologue de qualité. Le thème de l’après-violence (femme vitriolée) a été bien traité dans le film et le débat fut de qualité. Le lundi 17 juillet 2023 : nous avons renvoyé les rapports de fréquentation auprès de Libération films et avons ensuite payé la facture relative à ceux-ci. Le projet s’est clôturé par une réunion d’évaluation avec les participantes et l’équipe. Toutes les participantes se sont montrées enchantées d’avoir participé à ces animations et se sentaient mieux car elles avaient pu discuter de leurs problèmes, de leurs craintes et échanger librement avec d’autres victimes. Ce soutien psychologique leur a été d’un grand secours.