2016 – Les missions des plannings familiaux, quelle aide les femmes peuvent-elles attendre?

La Présidente a introduit le sujet et présenté Mme Duygü Celik, Conseillère de la Ministre Eliane Tillieux, qui représente ce soir Mme Christie Morréale, Députée wallonne, absente pour la rencontre car elle était souffrante.  On a tendance à parler d’une série de droits acquis par les femmes et à s’en réjouir mais il est primordial d’en parler à nos enfants et de leur dire que ces droits ne sont pas acquis définitivement.  On peut toujours les annuler dans l’avenir.  C’est un peu ce qui se passe actuellement avec l’IVG.  Auparavant, les avortements étaient clandestins.  Les missions des centres de planning familial sont souvent remises en question.  On en parle beaucoup actuellement en Belgique et il est prévu de revenir sur certains droits acquis par les femmes avec beaucoup de travail et de courage et ce serait un recul important dans leur émancipation de revenir en arrière.  Pour rappel, le 16 février 1966, les femmes de la fabrique FN d’Herstal lancèrent une longue grève pour se plaindre de l’écart salarial qui était très important entre femmes et hommes.  Cette grève dura longtemps.  De nos jours, l’écart salarial est toujours estimé à 22 % entre les femmes et les hommes et il faut continuer de revendiquer nos droits afin de faire cesser cette inégalité.  En Belgique, on constate qu’il persiste malheureusement encore de nombreuses inégalités entre les femmes et les hommes et que rien n’est fait pour y pallier.

 

Les centres de planning familial sont des endroits familiers et accueillants, accessibles à tous sans aucune restriction.  On y trouve des médecins, des psychologues, des juristes, des assistants sociaux, …  Ils ont de très nombreuses missions et la prise en charge y est très large : consultations médicales pour obtenir la pilule, consultations pour des problèmes de couple, violences conjugales, sexualité, drogue, demandes d’informations diverses…

 

Un agrément de la RW cadre strictement les missions et obligations des centres de planning familial.  Il s’agit de services ambulatoires de santé publique qui ont une approche positive et pluridisciplinaire.  Il est important que les personnes qui les consultent voient leurs droits reconnus et qu’elles ne fassent pas l’objet de la moindre discrimination.  La liberté de choix au niveau des méthodes contraceptives ou de la poursuite d’une grossesse est importante.  Les centres de planning familial ont l’obligation de respecter les choix des personnes qui les consultent.  Ils ont une mission d’information, d’éducation et de prévention.  L’accès à l’avortement y est autorisé.  L’avortement est cependant toujours condamné dans le code pénal, il s’agit là d’une aberration.  Tout centre de planning familial doit procéder lui – même à l’avortement ou accompagner la patiente vers l’endroit où elle pourra avorter sans la laisser en situation de détresse.  Il s’agit d’une obligation légale.  La prévention et le dépistage des IST y est également prévu.  Une aide juridique et sociale y est assurée.  Les violences conjugales, psychologiques et autres types de violences y sont pris en charge également.   On trouve un large panel d’offres proposées au sein de ces centres.  Des animations dans les écoles et le secteur associatif sont assurées au niveau affectif et de la vie sexuelle.

Les Centres forment également les professionnels de la santé au sujet de la vie affective, relationnelle et sexuelle des individus.  A plusieurs reprises, leurs modes de financement ont été modifiés afin d’avoir un système assurant la sécurité des centres.  Un système forfaitaire permet aux centres de planning familial de ne plus se faire de concurrence.  Il existe 170 centres de planning familial en Wallonie et à Bruxelles.  Ils existaient déjà en 1970.  Ils se sont fédérés dans les années 1980.  Dès l’arrivée de la pilule, les centres se sont créés un peu partout en Belgique.  Il est vrai qu’une prise de conscience eut lieu lors de mai 1968.

 

L’avortement cause débat car chaque femme doit pouvoir disposer de ses choix selon ses propres convictions et valeurs.  La liberté de choix est primordiale.  En 1990, le rôle des centres de planning familial a visé l’autorisation de l’IVG.  Cette loi de 1990 est extrêmement bien cadrée et a une valeur symbolique.  Elle crée une exception car les médecins ne risquent pas la prison.  Cela a une signification importante pour les organisations féministes qui s’inscrivent dans ce combat.  Par exemple, le Luxembourg l’a retiré de son Code pénal.  Toute femme en situation de détresse peut avorter.  Le médecin doit évaluer le niveau de détresse au cas par cas.  Aucun âge n’est précisé : mineure ou majeure, peu importe. Un avortement doit avoir lieu dans un endroit prévu à cet effet.  Un soutien psychologique et une information sur les droits et les moyens de contraception est donnée à la patiente.  Lorsqu’une femme a pris la décision d’avorter, elle est encadrée et doit respecter les délais légaux pour avorter.  Après la première consultation, il y a un minimum légal de 6 jours avant de pratiquer l’avortement.  Il s’agit d’un délai de réflexion légal obligatoire.

On peut considérer que 3 avortements sur 4 se font dans des centres de planning familial.  Les hôpitaux n’assurent pas le même service au niveau de l’encadrement.  A partir de la conception, le délai maximum pour avorter est de 12 semaines.  Toutes les femmes européennes n’ont pas droit à l’avortement.   En Hollande, le délai est plus long (14 semaines) et certaines Belges s’y rendent pour avorter lorsqu’elles ont dépassé le délai légal belge.

 

Il existe aujourd’hui encore de nombreux obstacles concernant ce droit qui n’est pas acquis définitivement.  L’IVG n’est pas accessible à toutes car de nombreuses femmes n’ont pas accès à la mutuelle et ne peuvent donc être remboursées.  Les seules personnes qui peuvent accéder à l’IVG devront se payer une intervention transfrontalière au prix de 900 – 1 000 €.  La loi dépénalise de manière partielle l’avortement.  L’état de détresse de la femme enceinte doit être reconnu par un médecin.  La Loi l’exige.  Il existe aussi une clause de conscience dans cette Loi.  A titre individuel, un médecin peut considérer qu’il n’applique pas l’IVG.  Chaque médecin est libre de son choix.  De nombreux jeunes médecins refusent de pratiquer l’IVG.  Ceux qui la pratiquent sont souvent plus âgés.  On peut se poser des questions à ce sujet…  Un hôpital n’a pas le droit de refuser de pratiquer une IVG même si des institutions catholiques remettent en cause la pratique d’une IVG.  Il faut savoir qu’il s’agit d’un comportement illégal et ces établissements sont cependant tenus de pratiquer ces avortements.

 

En Europe, les mouvements religieux sont actifs au niveau de la Commission européenne et luttent contre l’IVG.  Il existe, par exemple, des manifestations PRO VIE qui défilent dans les grandes capitales européennes et qui ont un grand impact sur le gouvernement et la Commission européenne.  Ces organisations réussissent à récolter des signatures citoyennes et les transmettent à la Commission européenne.  Les mouvements laïcs agissent de la même façon mais n’ont pas encore le même impact que les mouvements catholiques.

 

Le débat belge (surtout au niveau du CD&V) revendique le droit de ne pas pratiquer l’IVG.  Des propositions sont sur la table du Parlement fédéral.  Elles visent à donner la possibilité de reconnaître un enfant mort-né, à l’inscrire dans le carnet de famille, à pouvoir organiser des funérailles, … tout cela en vue de favoriser le processus de deuil de la famille.  Ces revendications risquent de nuire au droit des femmes et au droit à l’avortement.  Sur certains sites internet, on constate des mouvements moralisateurs qui luttent contre l’avortement et les jeunes qui utilisent beaucoup internet risquent d’être influencés par ces messages.  Même le Service public ne parvient pas à créer un site officiel objectif qui renseignerait correctement les femmes.  C’est une chose incroyable.  La Belgique est un pays de compromis et on se souviendra longtemps du Roi Baudouin qui avait abdiqué durant le vote de la loi concernant l’avortement de manière à ne pas prendre position.  Au niveau européen, cette situation à géométrie variable dans différents pays européens pose problème.  L’Europe peut remettre en question l’avortement comme c’est actuellement le cas en Espagne.  Certaines organisations progressistes souhaitent étendre au niveau européen le droit le plus étendu pour les femmes dans les pays les plus progressistes et l’appliquer au niveau européen mais cela est une utopie.

 

Les centres de planning familial peuvent délivrer la pilule du lendemain aux femmes.  L’assistante sociale du planning familial pouvait la délivrer mais la RW a compris qu’il y avait un défaut d’interprétation de la Loi de 1967.  Dès lors, la pilule ne peut plus être délivrée sans ordonnance médicale.  C’est uniquement lorsqu’un médecin délivre l’ordonnance que la pilule peut être prescrite.  Certains centres de planning familial restent dans l’illégalité car ils estiment qu’ils doivent répondre aux besoins des femmes et prennent donc la liberté d’enfreindre la Loi.  A ce jour, le Ministre Prévot ne partage pas du tout la vision de l’administration wallonne mais les choses n’ont pas encore avancé.  Une interprétation d’une Loi des années 60 pose problème plus de 50 ans après l’élaboration de cette Loi …

 

La pilule est gratuite ou presque dans les centres de planning familial alors qu’en pharmacie, elle est payante.  Au planning familial, c’est confidentiel mais à la pharmacie, on risque toujours de rencontrer une connaissance.  Cela peut poser problème à certaines jeunes femmes qui veulent conserver un certain anonymat.

 

On encourage les écoles à faire appel aux plannings familiaux pour réaliser des séances d’informations auprès des jeunes.  Les thèmes à aborder restent assez flous et les établissements scolaires, selon leur sensibilité, choisissent quels thèmes seront abordés.

Les étudiants de l’enseignement secondaire technique et professionnel sont moins bien informés que ceux de l’enseignement général.  Il s’agit d’une double discrimination car ce sont justement les étudiants en technique et du professionnel qui ont besoin d’avoir des informations.  L’utilisation des moyens de contraception est importante mais la prévention n’est pas suffisante.  Près de 6 jeunes sur 10 actifs sexuellement ont eu des relations sexuelles non protégées avec tous les risques des maladies sexuellement transmissibles et du SIDA.

 

Les animations ont pour utilité de montrer également ce qu’est la sexualité aux jeunes.  Certaines familles n’en parlent pas et d’autres en parlent librement.  Chacun est donc différent en ce qui concerne cette information.  Les jeunes apprennent souvent la sexualité par leur père ou par la pornographie dans le pire des cas.  Des familles n’ont pas pu faire passer le message et les garçons n’ont connu que des sites pornos et ne savent pas comment ils doivent se comporter avec les filles.  Des valeurs importantes doivent être inculquées aux enfants et cela permet d’éviter des problèmes par la suite.